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Chirurgie esthétique Jallut & Bartolin

La rhinoplastie à un tournant

Préservation ou structurelle ? Mon approche personnelle Yves Jallut (Avignon)

La rhinoplastie prendra-t-elle le tournant de la préservation sans rentrer dans une polémique stérile à l’image de celle ayant opposé en son temps la voie endonasale à la voie ouverte ? Pour savoir si cette nouvelle approche était digne de figurer dans l’armamentarium de la rhinoplastie, il fallait une transition délicate obligeant le chirurgien à sortir de sa zone de confort pour s’engager sur un terrain inconnu. D’autant plus que la méthode est très ancienne [1] puisque les plus vieux articles répertoriés remontent à 1899 [2, 3]et 1914 [4], puis réactualisés en 1946 par COTTLE [5]qui laissera son nom à cette technique. En France, il est bon de rappeler les publications de SEBILEAU et DUFOURMENTEL [6], de GOLA [7] ainsi que les récents travaux de Yves SABAN [8]. Alors pourquoi un tel retour ? Cela s’explique certainement par le courant actuel d’utiliser des techniques plus conservatrices, d’où une chirurgie peut-être plus « écologique » en regard d’une chirurgie structurelle plus agressive.

Que peut-on reprocher à la chirurgie de résection de bosse telle que l’avait décrit jacques JOSEPH  [9]? Quand on revoit les statistiques post-opératoires comprises entre 7 et jusqu’à plus de 20% de révisions chirurgicales, les principaux défauts rencontrés sont des irrégularités du dorsum nasal, des troubles respiratoires, des déviations résiduelles ou des asymétries notamment au niveau de la pointe. Malgré tout, les résultats restent globalement satisfaisants pour l’immense majorité des patients et cette méthode structurelle reste la méthode la plus utilisée dans le monde entier.

Alors, pourquoi changer ? Les problèmes de retouche secondaire au niveau du dorsum ou du 1/3 moyen sont souvent mal admises par une patientèle de plus en plus exigeante et de moins en moins tolérante. Si les techniques de remodélisation de la pointe du nez restent les mêmes, la préservation permet de conserver les attaches ligamentaires et cartilagineuses[10, 11] par une dissection sus- ou sous-périchondrale et sous-périostée pour la partie osseuse, respectant l’intégrité du 1/3 moyen du nez et notamment la valve interne ainsi que les triangulaires. En effet, selon notre point de vue, le 1/3 moyen joue l’effet d’un véritable « balancier » et son respect permet de conserver une bonne symétrie du nez et de limiter les éventuels défauts post-opératoires.

Cette nouvelle manière d’aborder le dorsum nasal m’a été transmise par Yves SABAN et Milos KOVACEVIC. Dans les suites de mes 20 premiers cas, m’inspirant de l’article de TORIUMI [12], j’ai pu peser les avantages, les limites et les inconvénients de la préservation dorsale.

Mes premières constatations résident dans la rapidité du geste car bon nombre de temps opératoires indispensables dans la chirurgie structurelle comme la reconstruction du 1/3 moyen ne sont plus nécessaires ; la keystone-area est également respectée. Il est certain que pour un chirurgien ayant eu un training en Maxillo-Faciale ou en ORL, ces décollements ne posent pas de difficulté particulière, surtout dans une rhinoplastie primaire. Le respect de la valve nasale évite un éventuel collapsus secondaire de celle-ci par résection excessive et donc une potentielle gêne respiratoire à l’inspiration. La question qui vient donc immédiatement à l’esprit est : « comment peut-on garder un dorsum intact ? ». La voie d’abord se répartit entre voie endonasale ou voie ouverte si un geste complémentaire sur la pointe est prévu. Ensuite se pose le choix de la technique du push down simple ou du let down:

  • Le push down consiste en des ostéotomies latérales et médiane au niveau du radix qui permettront de mobiliser complètement l’auvent osseux. Cette technique de base est très utile surtout en cas d’auvent osseux dorsal étroit. Ces ostéotomies seront complétées par l’excision d’une bande cartilagineuse haute sous la bosse (high strip) telle que l’a décrite SABAN [8]ou une bande plus basse en regard du pied de cloison plus rare à mettre en pratique[13] et à réserver pour les cas difficiles de déviation basse du septum. Personnellement, je pense que pour débuter, la résection haute est à préférer car le recul de la ligne de profil sera plus facile. Cette résection est prolongée au niveau de la lame perpendiculaire, en évitant tout mouvement de twist avec le rongeur ou la pince-gouge sur le septum osseux.

 

Résection haute (high strip)
Le push down (dessin de Yves SABAN)
  • Le let down: La technique est la même sauf que l’on résèque en plus une partie de la branche montante du maxillaire supérieur dans sa partie la plus échancrée, ce qui permet de dégager plus d’espace pour le recul. Pour ma part, je préfère cette deuxième méthode qui permet de donner plus d’amplitude au recul du dorsum et surtout de corriger le côté trop évasé des OPN.
Let down (Dessin de Yves SABAN)
Let down

En cas de recul important nécessaire ou de déviation notable, un subdorsal Z flap tel que l’a décrit KOVACEVIC[14] permettra d’aligner le bord caudal septal ou de corriger un effet twist de la portion antérieure du septum. Les deux segments cartilagineux du septum seront ensuite suturés entre eux. Pour les ostéotomies push down ou let down, celles-ci peuvent être exécutées soit avec de simples ostéotomes, soit avec une instrumentation piézoélectrique telle que l’a décrit Olivier GERBAULT[15] [16]. Cette dernière technologie a ma préférence car plus précise en laissant des coupes osseuses régulières. Les berges osseuses ne sont pas ostéosynthésées.

Les premiers résultats sur les 20 premiers cas sont très encourageants, en particulier la stabilité du 1/3 moyen qui est conservée tant sur le plan esthétique (lignes de SHEEN) que sur l’aspect fonctionnel (retour rapide à une respiration normale).

Selon mon opinion, pour débuter dans la préservation dorsale (DP) , les critères les plus importants sont donc :

  • Nez primaire
  • Bosse petite ou modérée
  • Dorsum étroit
  • Nez droit ou déviation légère

Par la suite, la courbe d’apprentissage progressant, j’ai étendu mes indications pour des bosses plus importantes, des nez plus longs ou déviés, ainsi que pour certains nez secondaires.

1er cas : Nez long légèrement dévié avec pointe tombante, bosse conséquente. Correction par let down, subdorsal Z-plasty et double columellar strut niveau pointe

2ème cas : nez avec pointe large et en goutte, bosse modérée. Correction par push down et double columellar strut niveau pointe

En conclusion, la technique de préservation a gagné tout naturellement sa place parmi les techniques conventionnelles de rhinoplastie. Loin de s’opposer à la chirurgie structurelle classique, la préservation dorsale requiert un choix précis dans ses indications et permet également des gestes associés sur la pointe du nez si nécessaire. L’association de la chirurgie structurelle et de la préservation dorsale constitue ainsi une combinaison très puissante permettant de préserver l’anatomie et la fonction des 2/3 supérieurs de la pyramide nasale tout en contrôlant l’alignement dorsal et en restructurant si nécessaire la pointe du nez. Sans renier mon passé de chirurgien structurel, l’incorporation de la préservation dorsale dans ma pratique régulière s’est avérée être une avancée majeure qui se limite pour l’instant aux bosses modérées et aux rhinoplasties primaires.

  1. Kern, E., History of dorsal preservationb surgery. Seeking our historical godfather(s) for the « push down » and « let down » operations. Facial Plast Surg Clin N Am, 2021. 29(1): p. 1-14.
  2. Goodale, J., A new method for the operative correction of exagerated Roman nose. Boston Med Surg J, 1899. 140: p. 112.
  3. Goodale, J., The correction of old lateral displacements of the nasal bones. Boston Med J, 1901. 145: p. 547.
  4. Lothrop, O., An operation for correcting the aquiline nasal deformity. Boston Med Surg J, 1914. 170: p. 835-837.
  5. Cottle, M. and R. Loring, Corrective surgery of the external nasal pyramid and the nasal septum for restoration of nasal physiology. Illinois Med J, 1946. 90: p. 119-131.
  6. Sebileau, P. and L. Dufourmentel, Correction chirurgicale des difformités congénitales et acquises de la pyramide nasale. 1926, Arnette: Paris. p. 104-105.
  7. Gola, R., La rhinoplastie fonctionnelle et esthétique. 2000, Paris: Springer-Verlag France.
  8. Saban, Y., R. Daniel, and R. Polselli, Dorsal preservation: the push down technique reassessed. Aesth Plast Surg J, 2018. 38(2): p. 117-31.
  9. Joseph, J., Ueber die operative Verkleinerung einer nase (Rhinomiosis). Berliner Klinische Wochenschrift, 1898. 40(3.october 1898): p. 882-885.
  10. Marcus, J., A. Thomas, and H. Levites, The ligament preservation and suspension: why and how ? Facial Plastic Surgery Clinics, 2021. 29(1): p. 47-58.
  11. Palhazi, P., R. Daniel, and A. Kosins, The osseocartilaginous vault of the nose : anatomy and surgical observations. Aesthet Surg J, 2015. 35: p. 242-251.
  12. Toriumi, D.M., My First Twenty Rhinoplasties Using Dorsal Preservation Techniques. Facial Plast Surg Clin North Am, 2023. 31(1): p. 73-106.
  13. Kosins, A., Incorporating dorsal preservation rhinoplasty into your practice. Facial Plast Surg Clin N America, 2021. 29(1): p. 101-111.
  14. Kovacevic, M., J. Veit, and D. Toriumi, Subdorsal Z-Flap: a modification of the Cottle technique in dorsal preservation rhinoplasty. Curr Opin OtoLaryngol Head Neck Surg 2021. 29(4): p. 244-251.
  15. Gerbault, O., R. Daniel, and R. Kosanovic, The role of piezoelectric instrumentation in rhinoplasty surgery. Aesth Surg J, 2016. 36: p. 21-34.
  16. Goksel, A. and K.N. Tran, Open Preservation Rhinoplasty Using the Piezo Electric Instrument. Facial Plast Surg Clin North Am, 2023. 31(1): p. 59-71.

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